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Ce groupe se veut ouvert à tous ceux qui aiment la musique des mots de notre belle langue française. Il aurait pu s'appeler nid de plumes, puisqu'il a vocation de réunir les amis de l'écriture... comme de la lecture !
 
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 Chapitre 1

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MessageSujet: Chapitre 1   Chapitre 1 Icon_minitimeJanvier 27th 2009, 17:05

"La Cité sous la Ville"

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Sanderus traînait la jambe, depuis treize ans que le commissaire avait quitté la police, pour la première fois, il arpentait le pavé des ruelles. Tout à l’heure, une voiture de patrouille l’a éclairé de son phare autonome. « Bonsoir commissaire» avait crié, rassuré le conducteur invisible.

Sannderus avait levé la main pour répondre, mais maintenant, il regrettait de ne pas s‘être fait reconduire. S’il n’avait pas rencontré Bollens, il serait déjà au lit, près de Marguerite, son épouse et chaufferette habituelle. Comme d’habitude, Jef était surexcité, tellement même, qu’il l’avait tutoyé, «Content de te voir Jacques, je suis sur une piste ! ».

Il n’avait pas changé, toujours en chasse. Entrés dans la police, le même jour, Sanderus devenu rapidement adjoint puis commissaire, chargé du bureau des homicides. Jef ne le tutoyait plus. Il avait acquis une connaissance encyclopédique des dossiers. Longtemps adjoint d’un supérieur qui exploitait ses dons, il finit par devenir commissaire dans la périphérie, la quatorzième division.

« J’ai eu comme une intuition. »

Sanderus l’avait conduit à la « Boule de papier d’argent », ils buvaient une kriek, cette bière de la cité, unique au monde, qui fermente grâce aux effluves de la rivière qui traverse la vallée, on y ajoute des cerises amères.

On la sert accompagnée de nombreux morceaux de sucre. Sanderus écrasait le sucre dans la boisson moussante en écoutant son compère. Comme tout le monde, il avait lu la presse, cinq jeunes hommes appartenant aux meilleures familles de la ville avaient disparus, ainsi que deux jeunes filles.

Personne n’avait porté plainte, un macabre journal du matin avait donné des informations, fugues ou enlèvements.

Patient, fureteur, Jef avait découvert qu’ils appartenaient tous à la Société de l’Ommegang, ce groupe de notables qui organisaient la grande procession annuelle. Sanderus a téléphoné à Marguerite pour signaler qu’il ne rentrerait pas dîner, ils avaient mangé une saucisse avec de la choucroute et il écoutait Jef développer ses déductions. Etonnant personnage, il portait la moustache, comme Jacques à l‘entrée dans la police, mais ce dernier y avait renoncé. La moustache grise de Jef soulignait un gros nez aux ailes rebondies qui lui donnait l’apparence d’être inattentif. Tous les vêtements sur son corps devenaient informes, en civil ou en uniforme, il paraissait engoncé.

Les yeux à demi-fermés, Sanderus ne perdait pas un mot.

« Tu te souviens du Grand Serment des Hallebardiers, tu les as soupçonnés, jadis de comploter contre l’Etat. Ils ont remis cela, les gamins complices ou prisonniers sont inscrits chez eux. »

Sanderus s’en souvenait d’autant mieux qu’il avait déménagé à l’époque pour habiter près du parc, pour surveiller les allés et venues. " J’ai découvert un lieu de réunion secret. Quand Horta a dessiné le Palais des Beaux-Arts, près de la place Royale, il s’est raccordé au niveau des travaux de la jonction Nord-Midi, cette gigantesque trouée qui consiste à faire rouler les trains sous la ville, pour joindre la gare du Nord à la gare du Midi. Mais il est descendu plus bas, sur le pavé médiéval, créant une sortie sur le parking de la Putte".

Sanderus se souvenait parfaitement d’avoir raconté tous ces détails à Jeff. Il y a plus de vingt cinq ans, ils étaient de service, lors d’un défilé de l’Ommegang sur la Grand' Place. Deux cents hallebardiers drapés de rouge et blanc passaient fièrement entre les barricades. « Dis! Ces gugusses feraient bien d’aller se rhabiller ! »

« Ces gugusses faisaient ton boulot, au XI ème siècle. Le duc qui aimait chasser le canard et la grue huppée dans la vallée a octroyé une Charte aux habitants des marais, qui les autorisaient à élever des remparts pour se protéger des voleurs et à engager une milice bourgeoise. Commerçants, petits artisans ou agriculteurs, sont organisés par métiers. Les bouchers créent un bataillon armé de hallebardes qui circulait toute la nuit dans les ruelles étroites, éclairé par des lanternes, criant : « Il est onze heures. Tout est calme ! Bourgeois dormez bien .» Rappelle-toi la « Ronde de Nuit » de Rembrandt que nous avons vue aux Pays-Bas.

Les archers assuraient la défense des remparts. Les plus riches des corporations accueillaient les arbalétriers et trois siècles plus tard, les mousquetaires. »

« Mais alors, d’où viennent ces rumeurs de rebellion ? Ce n’est pas la police qui se révolte ! »

« Tu sais Jef, des années étaient passées et les Confréries, Serments et Guildes, devenues folkloriques, défilaient devant les souverains, qui confiaient la sécurité à leurs propres troupes. Après Charles Quint, l’inquisition espagnole a décimé les cadres des Serments. »

Jef était revenu un jour sur cette conversation, « Vous ne m’avez pas dit, commissaire, comment les Espagnols sont partis ? »

« Les Français les ont chassés ! »

« A la Révolution. »

« Non, cent ans auparavant, Louis XIV a mis le feu à la Cité, le Maréchal de Villeroi, sur l’ordre du roi, avait fait tirer à boulets rouges sur la Ville. On a retrouvé à l’altitude 100, les restes des fours qui servirent à chauffer les boulets qui ont réduit en cendres ces bâtiments de bois. Après l’incendie de 1695, la ville détruite n’a pu être reconstruite que sous le régime autrichien, faute d’argent. Le gouverneur Charles de Lorraine prit une part active à cette réalisation en dur. »

Tout en regagnant son domicile, Sanderus réfléchissait aux révélations de Bollens. Horta a aménagé une sortie au Palais des Beaux-Arts, des escaliers qui donnent accès aux parkings, une porte latérale, sans serrure, s’ouvre sur une petite pièce carrelée, au centre un escalier en colimaçon descend dans l’obscurité et rejoint le niveau de la sortie. Il fallait l’imagination d’un Jef, pour descendre en éclairant la paroi, dans ce tube de béton, accroché à cet escalier de fer instable qui s’enroule et se déroule, A vingt cinq mètres du sol, une porte blanche, dans un léger renfoncement se distingue à peine du béton. Une petite plate-forme munie de garde fou de fer permet de quitter l’escalier mouvant. Le commissaire pensait à Jef, la torche électrique pendue par un bout de ficelle, autour du cou et sondant les ténèbres impénétrables. L’escalier hélicoïdal se balançait à chacune des marches, suspendues aux précédentes par une chaîne métallique. Cet homme de soixante dix ans n’avait pas hésité à saisir le garde-fou de la plate-forme.

La porte, n’était pas fermée à clé. La lampe de Jef éclairait un couloir clair au carrelage propre, éveillant sa méfiance, et se termine par une lourde porte de chêne, munie d’une poignée de bronze. Il a compris en un instant, qu’Horta a découvert le souterrain, n’a rien dévoilé à la Presse, pour ne pas retarder ses travaux, mais avait réservé l’avenir.

Sanderus ralentit, il approchait de son appartement. Ses pensées se concentraient encore sur ce phénomène de Jef Bollens, cet ordinateur vivant, a quitté l’école à 12 ans. Le policier retraité, n’avait pas craint d’ouvrir la porte. Sa lampe de poche éclairait une grande salle voûtée, soutenue par des colonnes de pierre. Un comptoir face au visiteur portait un in-folio relié de grosse toile noire. Derrière cette barrière de chêne clair qui sentait l’encaustique, un rayonnage rempli de larges chapeaux de feutre noir, la coiffe entourée d’un étroit ruban, blanc et rouge et les plumes de coq du hallebardier.

Le registre très ancien, reliait des listes de membres sur parchemin depuis l’origine. Jef y avait relevé sans difficulté les noms des sept jeunes disparus donnés par le funèbre journal.

Scrupuleusement il a noté dans son carnet : Carlo de Morteville, Gérard Spuys, David Blumenfelt, Stéphanie Langdael, Jean Corte de Teroigne, Tiny van der Peeren et Georges Davout.

Sanderus pénètre avec précaution dans son immeuble, il est presque trois heures. Dans le hall d’entrée, une lueur filtre sous la porte des caves.

Il allait éteindre sans sommation, pensant à un oubli ou à une négligence, mais par acquit de conscience, il descendit les marches. Il entendit un bruit furtif et le grincement d‘une porte.

Du fond du couloir, il reconnaît son voisin, Robert De la Barre, qui semble avoir élu domicile dans sa cave. « Bonsoir commissaire, On fait la fête ! »

Enveloppé de son pardessus, avec son chapeau et son écharpe, l’inquiétant personnage croise Sanderus qui répond « J’ai rapporté du saumon fumé pour ma femme. Et, je vais lui chercher une bouteille de Pouilly Fuisse, c’est celui qu’elle préfère. »

L’apparition avait gagné l’escalier, il ne venait pas de sa cave. Sanderus pénètre dans la cave des compteurs à eaux, dans l’ombre du fond un grand paravent de plastique tremble encore, coincé sous des tuyaux poussiéreux. Le commissaire se rend dans sa cave prélever une bouteille dans un casier de fil de fer, une des dernières. La modestie de sa retraite ne lui permettrait plus de regarnir sa cave. Un peu mélancolique, il dépose le vin dans le couloir et ferme la porte à double tour. Les voisins sont inquiétants, le moindre objet laissé dans les couloirs disparaît immédiatement. Il avait loué son appartement, il y a vingt ans pour surveiller le propriétaire, Alex Bollarski, ancien brocanteur qui possédait une boutique près de la gare du Midi. Usurier, banquier d’occasion pour la pègre, parfois receleur, il n’avait jamais été pris sur le fait. Il s’était retiré dans cette maison à l’entrée du parc. Cette construction remplaçait un bâtiment vénérable qu’il avait acheté à prix d’or. Les Renseignements Généraux notaient de fréquentes réunions des chefs présumés de la maffia locale. Mais les enquêtes n’avaient pu mettre en évidence le lieu de ces rencontres.

Dans la cave principale, le paravent attire l’attention de Sanderus. Dans la brocante jadis, il séparait la pièce unique du magasin et isolait du public une partie réservée. Trois cadres de fer, articulés, de deux mètres de haut et larges de 80 cm, tendus de rideaux de douche verts d’eau, couverts de fleurettes brunâtres cachaient les activités coupables du brocanteur. Mais ici dans cette cave que cachaient-ils ?

Sanderus décroche les trois panneaux repliés et superposés. A son grand étonnement, derrière les cadres une ouverture apparaît, étroite pour la carrure du policier, elle donne accès à un escalier de béton humide et exhale l’odeur fade des murs moisis.

Sans hésiter, Sanderus s’engage dans le passage, les marches sont glissantes, Bollarski nettoie lui-même les caves et les eaux savonneuses se répandent sur les marches. Sa lampe dans une main, son revolver de l’autre, il descend précautionneusement l’escalier. Après une vingtaine de marches, des murs de moellons ont remplacé le béton. Sanderus s’engage dans un boyau obturé par une porte massive soigneusement cadenasséee.

Retourné dans la cave principale, il va reprendre sa bouteille de vin dans le couloir, lorsqu’il revient dans la cave centrale, il tombe sur Jeannot, le locataire de gauche du second étage. "Bonsoir commissaire ! On va se pocharder à quatre heures du mat ! » Il ne l’avait pas entendu arriver, habillé d’un pardessus d'hiver, il remontait déjà, a grand bruit, l'escalier, sa manche gauche portait des traces de salpêtre comme celle du commissaire. Le cadre de fer avait retrouvé sa stabilité, mais le commissaire aurait juré qu’il l’avait replacé de travers. Il reprit le chemin du premier étage, lorsqu’il entendit derrière lui la voix de De la Barre, « Bonne fin de nuit commissaire, il fait déjà jour. »

Marguerite ne s’est pas réveillée, allongé à son côté, il réfléchissait, que faisait Jeannot et De la Barre à quatre heures du matin dans la cave, qui a remis en place le paravent de Bollarski ?

Il s’endormit aussitôt.

.../...
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