SÉBASTIEN SEPULCHRE n°1
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Un peu crispé, Sébastien Sépulchre, penche la tête,
« Oui, Maman, je ne traînerai pas en route ! »
« Efforce-toi de rentrer avant cinq heures, ton père devient furieux quand tu rentres tard. Il craint toujours que tes mauvaises fréquentations t'entraînent à faire le mal. »
« Quel mal veux-tu que je fasse, si je vais boire une petite bière avec des copains ? »
« II y a des femmes dans ces cafés, j'ai si peur que tu attrapes une mauvaise maladie. »
« En buvant une bière ? »
« Quand on est jeune, on se laisse entraîner, c'est connu. Tu ne me crois jamais ! »
« Ah! Mais si, Maman, je te crois. Mais tu te fais des idées. »
"Quand je vois les amis qui te reconduisent à la maison, ce sont tous des chenapans »
« Tu dis toujours cela, or ce sont des élèves de ma classe, ils appartiennent au meilleur milieu, Etienne est le fils unique d'un avocat. »
« Quand il est venu pour la première et j'espère la dernière fois, il m'a regardée comme une bête curieuse. J'étais gênée, littéralement il me déshabillait du regard. »
« Tu te fais des idées, il trouvait que tu étais très jeune pour être ma mère. Il me l'a dit. »
« C’est dégoûtant, j'en ai même parlé à ton père. Ce garçon a des manières malhonnêtes. »
« Aucun de mes camarades de classe ne trouve grâce à tes yeux, tu trouves cela normal ? »
« Ils sont tous mal élevés, malappris, ils parlent mal et ne font pas honneur à leurs professeurs. Des garçons de dix-sept ans devraient avoir une autre tenue. Je ne veux pas que mon petit garçon fréquente ces individus. »
« Bien Maman, je ne leur parlerai plus. »
« Tu feras bien. D'ailleurs ton père veillera à ce que tu tiennes parole. »
Sébastien courbe les épaules sous l'averse de récriminations maternelles. L'accès passé, il peut respirer. Il regagne sa chambre, son refuge. La discussion était bien plus serrée, lorsqu'il était rentré avec une jeune fille de sa classe, l'accueil glacial avait
sidérée Jacqueline, qui prétextant des travaux scolaires urgents avait pris la porte aussitôt. Ce jour là, sa mère consacra plus d'une
heure à le mettre en garde contre les petites gourgandines qui abusent des garçons aimables et naïfs.
Les 'travaux scolaires ' ont bon dos, je la vois d'ici, se rendre à un rendez-vous galant, on sent tout de suite que cette fille n'est pas sérieuse, et tu me feras le plaisir de ne pas la revoir. »
Assis dans son fauteuil recouvert de cretonne, Sébastien rêve.... Il rêve de femmes, nues ou plutôt de femmes qu'il déshabille. Son passe-temps favori. Il imagine l'excitation que ses attouchements procurent à la fille de ses songes.
La surveillance vigilante de sa mère, et l'intolérance du père coincé par la jalousie de son épouse, aggravent la timidité naturelle de Sébastien. A dix-sept ans, ses rêves reposent sur l'imaginaire, jamais il n'a vu une femme nue,
sauf dans l'encyclopédie, les créatures boudinées de Rubens ont nourri tout un temps ses pensées. Lorsqu'il doit s'adresser à une jeune fille, il rougit, il bafouille, il oublie les phrases si bien préparées nécessaires à
l'achat d'un livre.
A l'idée qu'il sera questionné au retour et que sa mère, tout en douceur, lui demandera, « la vendeuse était-elle aimable avec toi ? »
le rendait moite de terreur. S'il disait, « Elle était assez sèche, elle me
répondait avec froideur. »
La sentence tomberait aussitôt « Tu es comme ton père! Incapable de parler aux femmes. Tu es impoli, mon garçon, une femme sent cela.
A suivre...